La conférence sur la
jubilation, comme son nom l’indique, met en scène une sorte de
conférence dont le thème est bien sûr la jubilation.
Dans cette conférence
nous trouvons un personnage pilier, le conférencier, joué par
Camille Boitel en personne qui doit interviewer plusieurs éminents
spécialistes de toutes les catégories sur le thème de la
jubilation. Seulement, le personnage se trouve confronté étrangement
à leur absence. Serait-ce le thème de la jubilation qui les
intimide ? Car après tout, c’est un vaste sujet dont personne
ne détient les clés pour le résoudre ou du moins l’expliquer.
Face au public il se retrouve dans une situation assez embarrassante
qui risque de s’aggraver par le fait que son seul invité, qui n’a
pas de nom, a donné si je puis dire sa langue au chat et montre un
enthousiasme pour le sujet qui ne réveillerait pas un mort…
Ironiquement parlant. Mais le conférencier a
plusieurs ressources et se débat tant bien que mal avec le sujet en
inventant les interviews des spécialistes à travers l’invité
sans nom.
A travers cette situation
et par le biais de la scénographie, que nous traiterons ci-dessous,
la Cie L’Immédiat nous montre que la
jubilation est inculte, violente, imprévisible, insoumise et
venimeuse. Elle vous retourne un homme et réduit son sérieux à
néant, instantanément.
Le thème étant la
conférence, Camille Boitel a utilisé le dispositif typique d’un
conférence qui est : une table en longueur face au public
recouverte d’une nappe rouge, simple et agrémentée de divers
objets tels que des lampes de bureau, des gobelets en plastiques avec
des bouteilles d’eau un paquet de chips et des micros disposés
tout le long de la table à fréquence régulière. Il y a plusieurs
chaises (quatre me semble t-il) pour deux comédiens. Sans doute
pour combler le vide et pour imaginer les divers personnages exposés
dans la galerie des noms qui est jouée vers la fin de la pièce.
A droite de la scène, vu
du public, nous pouvons voir un tableau qui sert à projeter une
vidéo dite « loufoque » d’une soit disant interview à
distance et en directe. En effet, le conférencier doit à un moment
donné interviewer à distance un spécialiste de la jubilation, qui
apparemment, vidéo à l’appui, a décidé de faire la fête et de
n’en faire qu’à sa tête et qui bien sûr par ce fait qui ne
répond pas aux questions du conférencier.
Je me permets de souligner
le caractère absurde et chaotique de cette
scénographie, qui bien sur est volontaire,
du moins je l’espère. En effet, la jubilation se passe en partie
au niveau de la scénographie. Au premier regard nous avons une
scénographie réaliste, typique d’une conférence, froide et
stricte. Mais Camille Boitel renverse ces
codes en jouant l’absurdité via le chaos : Lampes qui
grillent, personnage sans nom (l’invité) qui ne parle pas,
micros, magnétophone qui ne marchent pas,
téléphone qui sonne à plusieurs reprises.
La situation est
volontairement bâclée, inachevée ce qui à mon avis a un lien
avec le thème de la jubilation, car la jubilation c’est
surprenant, imprévu et c’est ce qui sort des « cadres ».
Dans La
conférence sur la jubilation, le
cirque est présent par le biais du jeu clownesque que s’accaparent
les deux comédiens. Il est présent par leur
duo, hétérogène.
J’entends
par là, que c’est un duo, mais dont les membres sont complètement
différents. En effet, le conférencier est un personnage qui
monopolise la parole et assez nerveux. Son jeu est en premier lieu
droit, strict et sérieux. Puis, au fur et à mesure, le personnage
se trouve dans une situation lourde insoutenable par le fait que ses
invités sont absents et que le seul invité qu’il ait à
interroger ne parle pas et que le matériel ne fonctionne plus. Il
effectue alors une chorégraphie inquiétante, surprenante, sur la
jubilation. On pourrait dire avec un langage un peu plus familier
qu’il "se lâche" ou qu’il "pète un câble".
Un jeu
clownesque également avec le jeu de Pascal Le Corre qui interprète
le personnage sans nom. Son jeu à lui est statique physiquement
parlant, car du début jusqu’à la fin ( excepté un moment) nous
n’apercevons de lui que son tronc et sa tête. Son jeu est alors
basé sur les expressions du visage ou sur les actions qu’il
effectue sur la table (trafique la lampe, joue avec le paquet de
chips…) .
Pourquoi
est-ce un duo clownesque ?
C’est un
duo clownesque car le comique est présent. D’une part nous avons
le comique de situation avec
le fait le personnage sans nom de parle pas et que le conférencier a
besoin de son avis sur la question de la jubilation. Nous avons
également le comique de geste
via le conférencier qui effectue une multitude de mouvements
définissants certaines caractéristiques de certaines personnes avec
l’aide du personnage sans nom. Je parle bien sûr de la galerie des
noms où est représentée une palette d’individus appartenant à
la société (homme politique, adolescente, grand-mère, footballer,
muse, poète maudit, nourrisson…). Cela crée alors le rire, car
cette performance est l’étalage des clichés
via une performance qui pourrait être presque un jeu de ventriloque.
Le
comique du langage, avec un langage qui
s’accapare des termes scientifiques et intellectuels et qui remanie
ces expressions ou ces mots pour leur donner un sens absurde.
Le comique
de mœurs, avec la dénonciation d’un certain snobisme souvent
présent dans le monde intellectuel (poète, philosophe,
conférencier…)
Dans la conférence sur la
jubilation , le public participe mais reste tout de même à sa place
de public . Le débordement du public est alors contrôlé et
n’apparait qu’à certains moments de la pièce. Effectivement le
public participe en manifestant sa présence lorsque le conférencier
doit se justifier au téléphone, et prouver qu’il est bien à une
conférence. Une personne du public est à un moment donné
interpelée pour venir sur scène, ce qui fait toujours référence
au monde du cirque. Mais là encore sa liberté de participer reste
minime, puisque son rôle sur scène est de juste s’assoir sur une
chaise. Mais alors quelle place pour le public ?
Le public est en fait si
je puis dire le cobaye de cette conférence sur la jubilation. En
effet, par le biais des diverses péripéties de la pièce, le thème
abordé qui est la jubilation se retrouve dans le public. Le public
expérimente la jubilation. Il jubile au rythme de la parole et du
comique qui sort de la bouche du conférencier.
Mon avis est assez mitigé.
Effectivement cette pièce m’a plu pour diverses raisons :
J’ai beaucoup aimé le
jeu des comédiens qui, je trouve était très bon et très
performant, car jouer en restant statique physiquement me parait être
très technique et surtout sans rien dire ou du moins parler très
peu. D’un autre côté le jeu de Camille Boitel m’a plu et m’a
beaucoup fait rire. La quantité de texte qu’il doit débiter est
impressionnante. Le duo marche à merveille, l’effet clown opère
sur petits et grands.
Ceci dit concernant la
mise en scène, je suis plus sceptique. En effet, bien qu’elle soit
bien cadrée on sent qu’il y a des choses à changer, à modifier ou
à approfondir. Je parle par exemple du début qui met longtemps à
se mettre en place, le personnage sans nom est assis seul à la table
et attend l’entrée du conférencier. L’idée est bonne mais met
trop de temps et le spectateur a tendance à s’impatienter. Il y a
aussi des choses à approfondir à mon avis. Je parle par exemple du
jeu avec les chips qui n’est pas assez exploité. On se demande où
est la jubilation dans tout ceci… Bien sûr il y a des moments qui
échappent au cadre, au côté strict de la mise en scène mais
c’est toujours avec une certaine retenue que les comédiens
s’exercent à jubiler en direct de la scène.
Il est vrai que le mot
« jubiler » est un concept très dur à illustrer, car
comme le dit Camille Boitel, il est dur de parler d’une chose
dont on ne connait pas vraiment la nature.
Le choix des costumes est
ingénieux. Le conférencier porte des chaussures de montagne pour
créer un décalage avec sa tenue sérieuse qui est un costard qui
lui va un peu grand. Le personnage sans nom quant à lui porte un
costume qui se modifie tout au long. Au début, il est vêtu d’une
tenue sérieuse composée d’une veste de costard noir d’un
pantalon noir et d’un chemisier blanc avec un nœud papillon de la
même couleur. Il a également les cheveux attachés. Puis lorsqu’il
joue le personnage du clown il enlève la veste et le chemisier pour
rester en Marcel avec le nœud papillon. Il détache ses cheveux et
se recouvre le visage d’un fond de teint blanc et met une perruque
de clown verte agrémentée d’un nez rouge.
Le personnage sans nom
est intéressant car au fond il n’est personne.
J’ai beaucoup aimé le concept de la galerie de personnages, car
son changement d’expression était radical et impressionnant.
L’autodérision de Camille Boitel m’a également plu. Le fait que
Camille Boitel interviewe Camille Boitel joué par le personnage sans
nom (Pascal Le Corre) revêtu d’une perruque impressionnante
ressemblant à la coupe de cheveux du concerné fut intéressant.
Voici un exemple de la jubilation bien exploité. Quoi de mieux pour
jubiler que pouvoir se permettre de s’interviewer soi-même sans
prendre sa propre position sur le sujet de la mise en scène ?
Je
peux conclure sur le fait que ce spectacle m’a dans l’ensemble
plu, j’ai passé un bon moment et j’ai trouvé qu’il était de
qualité mais ceci dit ce n’est pas un spectacle qui m’a
transcendé par le fait que j’ai trouvé qu’il y avait plein de
choses à exploiter qu’ils n’ont pas ou très mal exploitées, ce
qui, je dois l’avouer, m’a un peu frustrée. Ce soir-là j’ai vu
un bon spectacle mais je n’ai pas jubilé.
Flora Tle 4L
"Très réfléchi mais décevant..."
"La Conférence sur la Jubilation est une pièce de Camille Boitel qui, habitué à mettre sur la scène un véritable capharnaüm,
a décidé de surprendre ses spectateurs en organisant une conférence
sur la jubilation très sobre. Cependant tous les spécialistes conviés ne sont pas venus.... Peut être tout simplement parce qu'à
la question « Qu'est ce que la jubilation ? », personne ne peut répondre
en toute certitude. C'est ainsi qu'il n'y a au plateau que deux acteurs :
Camille BOITEL lui même et Pascal LE CORRE, un acteur remarquable puisqu'il
nous faisait rire tout en restant muet.
Dans cette pièce, le dispositif reste le même du début à la fin. En effet,
il y a simplement une table centrée au devant de la scène dotée d'une
nappe rouge en papier assez rustique. Dessus : des bouteilles d'eau, des verres, des micros, une lampe ainsi
que, derrière, des chaises. Mais cette table a également pour fonction
d'être un genre de coffre où l'on range aussi bien un jouet mécanique
qu'une bouteille d'alcool ou encore une perruque,... Boitel nous offre
donc une sorte de face à face où nous serons les cobayes de cette jubilation.
Un décor donc classique et de nature réaliste : Nous faisons partie de cette conférence ! Qui dit conférence
dit forcément costume classe. C'est d'ailleurs ici que Boitel se fera remarquer grâce à son blaser et son pantalon trop grand accompagnés
de ses grosses baskets faisant donc, d'entrée de jeu, référence au clown...
Avant même que les lumières ne s'éteignent et que le public ne
soit installé, le spectacle avait déjà commencé : un homme, un peu
âgé, était présent sur la scène, attablé, prêt à commencer cette conférence dont personne ne connaissait l'issue. Quand le silence fut installé, un homme apparut : ses long cheveux tombant
sur les épaules, un costume trop grand pour lui et de vieilles baskets. C'était Camille Boitel, le présentateur
clownesque de cette conférence sur la jubilation ! Un début assez calme
avec un invité totalement muet, presque provocateur par son silence
et lui, s'acharnant à le faire parler, ridicule malgré lui. C'est
donc là que le duo de clown s'instaure. Le présentateur désirant,
comme nous, d'avoir des réponses sur ce qu'est la jubilation, va peu
à peu nous en donner à son insu grâce au jeu de l'acteur qui fait
complètement délirer son personnage sans que celui ci s'en rende compte.
Ainsi, il nous fait comprendre, par le rire, que la jubilation est contagieuse,
qu'elle arrive n'importe quand, qu'elle est involontaire et donc incontrôlable.
De plus, les deux seuls invités présents ne savent quoi dire à toutes
ses questions. En effet, son collègue ne daigne lui répondre et le
public lui ne sait que faire, même lorsqu'un spectateur est convié
sur scène, il reste muet ! On rit tout simplement.. On jubile !
C'est donc pris d'angoisse, d'hystérie et dans une crise de nerf
complètement démentielle que ce présentateur va devenir un marionnettiste,
transformant alors son camarade assez énigmatique en un simple pantin
vêtu d'un t-shirt blanc, couleur neutre permettant plus facilement
de s'assimiler au personnage qu'il mimera. Camille Boitel va, pour cela,
le manipuler en lui faisant incarner une trentaine de rôles dont le
premier sera celui d'un clown, avec pour accessoires un nœud papillon,
un perruque verte et un nez rouge. On notera que, durant cet entretien,
il n'y a que le premier et dernier personnage qui auront des accessoires
les définissant ; le dernier étant le personnage de Camille Boitel
lui même, reconnu grâce à une perruque lui correspondant ! Il va donc
s'auto-critiquer en se demandant en somme à quoi rime ce spectacle
et ce qu'il a tenté de faire par là.
Le clown est donc bien présent aussi bien par le costume que par
le comportement des deux acteurs et des gags fait pendant les mimes.
Dans ce spectacle la parole est envahissante, si bien qu'elle prend
la place du corps. Ainsi l'homme parle et parle encore pour ne rien
dire. Je pense d'ailleurs que le fait qu'il n'y ait pas de micro qui fonctionne était voulu afin que l'on ne puisse pas distinguer
tout ce que les deux personnages disent. De plus, cette manipulation
de l'homme comme un pantin, une marionnette montre bien que les mots
n'ont plus de sens, on les emploie tous les jours mécaniquement, sans
vraiment faire attention à leur signification et c'est ainsi que nous
les « massacrons ».
J'ai, certes, trouvé ce spectacle très réfléchi sur certains points et d'autant plus intéressant lorsqu'il est mis en relation avec Novarina et ses machines ;
cependant je ne l'ai pas aimé. En effet, je l'ai trouvé drôle au
début mais il me semble que les gags utilisés ont été trop répétitifs, redondants, voire agaçants. Il y avait pourtant beaucoup d'idées mais elles était trop peu
exploitées. Ce travail m'a semblé inabouti d'autant plus qu'il n'avait
ni véritable début ni même une fin ( je n'ai même pas compris lorsque
que le spectacle fut terminé !). Je pense aussi que le décor était
trop pauvre et je dirais même pesant du fait qu'il n'y avait aucune
action. En effet, nous avons choisi la même mise en scène ; cependant,
nous bougeons et, dans notre scène ( qui est Le repas, scène finale
de l'Acte Inconnu), le corps prends le dessus sur la parole
ce qui explique que notre table ne fait pas obstacle à notre jeu et, de fait, est
moins pesant pour le public. Enfin, j'espérais vraiment que Camille
Boitel allait être à la hauteur de sa réputation et qu'il allait
m'en mettre plein la vue avec du cirque et des acrobaties. Or, hormis
un clown, je n'ai rien vu de tel ; il m'est même arrivé de m'ennuyer !
J'ai donc été beaucoup déçue de ce spectacle inabouti".
Elodie, Tle 4L